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Ayako
Dessin et scénario : Tezuka Osamu

Ayako, terminé


Volume 1 - 2003

Volume 2 - 2003

Volume 3 - 2004

 

1 avis


Herbv
Les Tengué sont une ancienne et puissante famille de la région (fictive) de Yodoyama. Pourtant, avec la défaite du Japon en 1945 et l’occupation américaine, les problèmes s’accumulent. Le plus grave est lié à la réforme agraire qui prive les riches propriétaires terriens d’une grande partie de leurs terres et surtout de leur pouvoir sur les fermiers, le système agraire étant encore à l’époque semi-féodal. Certes, ce pouvoir avait diminué dans les faits depuis plusieurs années, mais la réputation et l’honneur de la famille en imposaient toujours autant dans la région. Malheureusement, autre contrariété, la réputation des Tengué est écornée avec le retour de Jiro, le second fils, ancien prisonnier de guerre qui a « osé » ne pas mourir au combat. Il y a aussi Ayako, la petite dernière. Elle crée un embarras de taille même s'il reste caché : elle est la fille du patriarche et de sa belle-fille, l’épouse de l’ainé, Ichiro le successeur désigné du clan. N’oublions pas le jeune Shiro, collégien retors et enclin à la rébellion. Enfin, pour couronner le tout, il se révèle, suite à une enquête sur la mort d’un agitateur politique, que Naoko, la grand sœur lycéenne, est une de ces communistes honnis. La famille, c’est bien des soucis, surtout quand les temps sont troublés...

Ayako est une série en trois tomes épais réalisée entre 1973 et 1974 dans un magazine seinen, c’est-à-dire à destination d’un public de jeunes adultes. En effet, avec le succès rencontré par les titres plus murs et sombres, Tezuka s’est mis aussi à créer des œuvres plus dures. Le présent titre est le plus extrême dans ce genre, avec des thèmes comme l’inceste, les excès du patriarcat, notamment liés à aux codes d’honneur, à l'importance de l’apparence. Cela représente autant de situations qui débouchent sur des violences, notamment celles infligées aux femmes. Il y a aussi une évocation des années troubles de l’après-guerre, entre la montée du mouvement communiste, combattu sans pitié par les pouvoirs en place, mais aussi la connivence des yakuza avec le monde politique japonais, sans oublier les jeux de pouvoir au sein de la force occupante (les Américains). Il en résulte une histoire tellement noire que le titre n’a pas eu l’aura des œuvres plus grand public du Maître. D'ailleurs, certaines personnes considèrent Ayako comme étant un manga plutôt mineur de Tezuka quand d’autres estiment qu’il s’agit d’une de ses meilleures bandes dessinées. En France, il n’y a pas de doute : suite au succès de la première édition en 2003, Delcourt prévoit de publier une nouvelle version (la troisième en quinze ans) en avril 2018.

Toutefois, Ayako n’est pas sans défaut. Comme souvent avec Tezuka, il y a parfois des problèmes de rythme et certaines parties sont moins intéressantes que d’autres. Cela varie selon les goûts des lecteurs : citons la mise en scène du patriarcat, la vie d’Ayako, mais aussi l’enquête policière servant aussi de fil rouge, sans oublier les relations entre yakuza, et entre ces derniers et la classe politique japonaise. En effet, le mangaka développant plusieurs fils narratifs, passer de l’un à l’autre crée parfois une cassure dans le récit. C’est un peu ce qu’il se passe avec le drame d’Ayako. Alors que le chapitre 13 est particulièrement fort avec la passation de pouvoir au sein du clan Tengué, une ellipse trop importante annihile quasiment toute la tension dramatique née de l’enchainement de faits sordides. Il est même possible de considérer que cette rupture temporelle marque la fin de l’excellence, puisque le troisième tome (chapitres 16 à 19) laisse une trop grande place au commissaire Geta et à son enquête policière peu intéressante, il faut l’avouer. Quant au final, il faut aussi reconnaître qu’en dehors des toutes dernières pages, il est assez poussif et peu vraisemblable.

Cela n’empêche pas le titre d’être un des meilleurs que Tezuka ait pu écrire, notamment grâce à une démonstration réussie des relations de pouvoir entre les hommes et les femmes, en mettant en exergue les excès du patriarcat, le malheur que ce système provoque autour de lui, au bénéfice d’une toute petite minorité qui se fait au détriment des femmes, certes, mais aussi de la majeure partie de la population masculine, celle qui n’a pas droit au pouvoir, ni à la liberté de vivre une vie plus en adéquation avec ses aspirations et ses capacités. L'auteur met en scène le besoin du pouvoir des hommes et l’aliénation qui en découle, surtout quand les motivations sont purement égoïstes. C’est ainsi que l’amour que portent plusieurs hommes à Ayako n'ouvre pas leur esprit aux aspirations et aux désirs de cette dernière. Leurs sentiments sont surtout égocentriques et la malheureuse reste ainsi enfermée dans la sphère privée, c’est-à-dire qu’elle va d’une prison à une autre. Ainsi, Tezuka bat en brèche l’accusation de misogynie de certains, qui ont toutefois de nombreux exemples pour alimenter leur argumentation. Malheureusement, la tonalité féministe d’Ayako reste sans autre véritable occurrence dans l’œuvre du Maître, à l’exception, peut-être de Barbara dont l’appréciation dépend, là aussi, beaucoup de la personne qui lit cet autre titre utilisant un personnage principal féminin fort.
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