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  Pierre
| Le dessinateur José Muñoz et le scénariste Carlos Sampayo forment un duo d'auteurs qui, à la suite de Breccia et Oesterheld, a considérablement contribué à la notoriété de la bande dessinée argentine.
C’est en Espagne, au milieu des années 70, qu’ils se sont rencontrés alors qu'ils se trouvaient tous deux en exil, ayant fui la dictature militaire qui sévissait en Argentine. Peu après, ils se font connaître avec la remarquable série policière Alack Sinner publiée dans le mensuel italien Linus, et en France dans Charlie Mensuel qui marque le début de leur collaboration. Ils ont par la suite signé plusieurs oeuvres isolées, et Jeu de lumières est l'une d'elles.
Si l'on passe sur une couverture franchement laide (mais à quoi donc pensaient les maquettistes ?), on découvrira une oeuvre énigmatique et fascinante.
3 jeunes personnes, toutes de nationalités différentes, se rendent en Italie à l'occasion des 80 printemps de Giangiacomo Haffner, le plus grand acteur du siècle. Bien qu'ils ne l'aient jamais rencontré, ce vieil homme comblé d'honneurs les accueille de bonne grâce. C'est que ces admirateurs lui ont préparé un bien étrange présent: ils ont conçu un mécanisme permettant de reconstituer, grâce à la lumière, l'image animée en 3 dimensions de Haffner à l'époque de sa jeunesse et de sa gloire. Déconcertant, cet hommage provoque un vif effet sur le grand acteur, mais celui-ci n'est pas au bout de ses surprises; les jeunes gens lui révèlent qu'ils ont aussi recréé l'image de l'actrice Gloria Ferraro, le grand amour de sa vie, disparue il y a près de 40 ans ...
C'est ainsi que ce "jeu de lumières" va faire ressurgir à la surface le passé enfoui de cet homme qui se ment depuis trop longtemps, un passé entaché d'un drame terrible. Mais le mensonge n'est-il pas au cœur du métier de comédien ? Cet amour absolu qu'il semble vouer à Gloria ne serait-ce pas plutôt celui que cet éternel égoïste se voue à lui-même ?
A travers cette histoire, bien plus limpide qu'il n'y parait, les auteurs mènent avec brio une réflexion sur le théâtre, art de l'éphémère, mais également une réflexion sur le caractère illusoire de la « réalité » qui semble n’exister pour nous que par le jeu de la lumière sur les êtres et les choses, et qui change selon l’éclairage qu’on lui donne.
Jamais noir et blanc n'a semblé aussi lumineux. L'art de Muñoz, définitivement affranchi de l'influence de son maître Hugo Pratt, fait merveille: le dessin, tout en contraste, prolonge par son expressivité les questionnements du récit.
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