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| Pierre l’aveugle et Paul le cul-de-jatte forment un duo peu ragoûtant. La vie ne les a pas gâtés, mais il faut bien s' entraider. Et comme ils passent régulièrement la nuit au poste, il faudra l’intervention bénéfique et totalement désintéressée de Barbara Casablanca pour les sortir de la rue. Mais le traitement de faveur de la brave dame, branchée macrobiotique, se révèle bien pire encore que les humiliations des policiers... |
  CoeurDePat
| Tout nouvel album d’Ayroles (François, pas Alain…), ce n’est peut-être pas en le feuilletant que celui qui ne connaît pas l’auteur aura envie de le lire. Le style graphique est en effet assez particulier, analogue à celui d’«Incertain silence», parfois très sombre du fait d’encrages abondants et mettant en scène des physionomies un peu spéciales.
Une des grandes force de cet album, c’est une originalité parfois poussée.
Dans les dialogues tout d’abord, avec un côté fréquemment décalé, jouant par exemple sur le fait que Pierre est aveugle, et quelques petites perles de répliques, comme au dos de l’album : "C’est pas parce que je vois pas que je peux pas peindre… Je suis pas manchot!" ; ces dialogues sont vraiment un réel plaisir à lire.
Dans le dessin ensuite. Ayroles participe activement à l’OuBaPo et utilise ici certaines techniques oubapiennes, mais légèrement, presque avec tact, et toujours à bon escient.
(Passage un peu technique)
Itérations iconiques (p.62, huit cases identiques représentant l’extérieur du commissariat), restrictions iconiques (p. 1), itérations iconiques partielles (p. 8, Pierre et Paul en train de cheminer), réinterprétation graphique absolument magistrale (p. 85), etc. Et puis la page 86 rappelle «Simbabad de Bahtbad» («Philémon»…), où le lecteur est contraint de suivre un ordre de lecture qui n’est pas celui des cases.
Bref, il y a de quoi faire. Et pourtant tout ceci reste discret, parfaitement intégré au récit et le servant. Rien d’artificiel donc, au contraire.
L’histoire quant à elle est originale dans son idée : deux personnages infirmes mais complémentaires, l’un rabougri et tétraplégique, l’autre grand et valide mais aveugle.
Autant le dire tout de suite, la ligne directrice de cet album, c’est Pierre et Paul. Les aventures qu’ils vont vivre ont une cohérence et une logique, mais il ne s’agit pas de quelque chose d’aussi marqué que, disons, un Thorgal, avec situation initiale, perturbation, aventure et fin. Là ce serait plutôt «on fait un morceau de chemin avec les personnages».
Mais bon, «Enfer Portatif» est un vrai plaisir à lire. Savoureux dans ces dialogues, très intéressant au niveau de son découpage et dans les techniques qu’il utilise, tendre et cruel à la fois, gentiment drôle, j’aime. |
bes
| Noir, noir, noir... Noir comme ce "road movie" bédéistique où l’on taille la route en compagnie de Pierre, l’aveugle et de Paul, le tétraplégique, noir comme le dessin de F. Ayroles, fait de grands à-plats, puissant et évocateur, proche de la gravure, noir comme l’humour qui émaille le récit.
Dans cette véritable cour des miracles, se côtoient infirmes et fous, un artiste de rue et un peintre branché, un faux mage et de parfaits gogos, une fille perdue, jardinière de son état et un pseudo-amateur d’art contemporain, fortuné comme il se doit.
Une mère, possessive et folle, sa fille handicapée, des escrocs désirant se venger de Pierre, une intelligentsia s’ébaudissant devant les toiles d’un aveugle, tout ce petit monde évolue autour des deux personnages principaux, un instant séparés, mais qui finalement se retrouveront pour reprendre leur route vers on ne sait où.
Les subtilités de mise en page et de découpage viennent servir l’histoire et ne cherchent pas à faire de l’esbroufe ou à prouver la virtuosité du dessinateur. Bref, une grande œuvre.
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