| Je n’ai pas de nom. Je viens d’être coupée. Trop tôt d’ailleurs ! Je me connais, il m’aurait fallu une bonne semaine de soleil en plus. Ils ne nous laissent jamais mûrir en paix. Hier, ils m'ont transportée dans un de leurs vieux tacots. Et puis ils m’ont exposée sur un marché inconnu, dans cette ville que je ne connais pas. Je vais supporter leurs palabres auxquelles je ne comprends rien. À ce régime-là, ce n’est pas mûrir que je vais faire, c’est pourrir ! Quand je pense que certains de mes camarades découvrent l’Europe ! Les linéaires climatisés de la grande distribution, qu’ils appellent ça...
Mais on les coupe encore plus tôt. Écoute, petit, je suis vendu ! On dirait qu’ils vont se taper dans la main...Difficile pour un régime de bananes de quitter l’Afrique colorée et rieuse pour une Europe terne et triste. C’est pourtant le voyage de ces bananes qui vont quitter le grand ciel de leur pays pour le gris confiné des marchés parisiens. |