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© Sarbacane

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Pereira prétend
ScénarioGomont Pierre-Henry | Tabucchi Antonio
DessinGomont Pierre-Henry
CouleursGomont Pierre-Henry
Année2016
EditeurSarbacane
SérieOne-shot !
Bullenote [détail]

Lisbonne, Portugal, en pleine dictature salazariste, fin juillet 1938. Dans une ville enveloppée d’un « suaire de chaleur », un journaliste vieillissant, le doutor Pereira, veuf, obèse, cardiaque et tourmenté, rédige chaque jour depuis plus de trente ans la page culturelle du quotidien très conservateur, le Lisboa. Dans cette vie endormie, déboule un certain Francesco Monteiro Rossi... et, de façon tout à fait inattendue, Pereira l’engage. Mais le jeune pigiste, au lieu d’écrire les sages nécrologies que Pereira lui a commandées, lui remet des éloges aussi sulfureux qu’impubliables de Lorca et autres Maïakovski, ennemis avérés du régime fasciste.

Et là encore, au lieu de congédier ce dangereux collaborateur, le doutor Pereira le garde, se prend peu à peu d’amitié pour lui, puis pour sa mystérieuse et belle compagne, qui se révèle être une fervente combattante révolutionnaire, au service des républicains espagnols. Devenue une oeuvre emblématique de la résistance au totalitarisme et à la censure, Pereira prétend raconte la prise de conscience d’un homme confronté à la dictature. Ou quand un homme décide de se battre la plume au poing !

 

2 avis

herbv
Le Doutor Pereira est le responsable (et unique rédacteur) de la page culturelle du quotidien catholique et conservateur, le Lisboa. Il ne s’intéresse qu’à la littérature, principalement française, et à la mort. Il faut dire qu’il n’a jamais su surmonter le décès de son épouse il y a de nombreuses années. La politique ne le concerne pas ; il préfère fuir un réel qui n’est pas réjouissant en 1938 : outre la dictature au Portugal, la guerre civile fait rage en Espagne, et le fascisme semble devoir triompher un peu partout en Europe. Mais « l’Europe c’est loin », comme le dit son ami Silva. Pourtant, suite à sa rencontre avec le jeune Monteiro et la jolie Marta, il va reprendre goût à la vie et se découvrir une conscience politique.

Pereira prétend est la deuxième adaptation de Pierre-Henry Gomont d’un roman en bande dessinée pour les éditions Sarbacane, après Les Nuits de Saturne sortie en 2015. Celui-ci est un (plus si) jeune auteur qui a débuté sa carrière en 2011, après un parcours atypique qui l’a vu suivre des études en école de commerce pour devenir auditeur, avant de reprendre des études afin de devenir sociologue. Puis il a fini par devenir dessinateur et scénariste de BD. Il délaisse ici les polards pour s’attaquer à un œuvre plus généraliste en adaptant le roman à succès de Antonio Tabucchi, un italien amoureux de la littérature lusitanienne et du Portugal, devenue sa patrie jusqu’à sa mort.

Le plus marquant, lorsqu’on ouvre l’ouvrage sur la première planche, est l’intensité des couleurs, toutes traitées en aplats. En effet, comme l’a fait remarquer Pierre-Henry Gomont dans différents entretiens promotionnels, il a été subjugué par la lumière de Lisbonne lorsqu’il y a séjourné pour faire ses repérages. Du coup, il a décidé de changer de technique de colorisation et, à force de recherches, a colorisé ses pages par superposition de calques, chacun représentant un passage de couleur, à la manière des sérigraphies. Les couleurs sont marquées, chaudes en journées, aussi bien dehors qu'en intérieur, bleu foncé la nuit et vertes dans les bois.

La narration aussi est remarquable. Si la mise en page est très classique, l’auteur a su contourner le système de voix off du roman original pour ne pas charger les pages de récitatifs. Pour cela, il fait souvent appel à un système de dialogues entre Doutor Pereira et des projections de ce dernier ou de sa défunte épouse. Un certain nombre de bulles de pensées contiennent des symboles au lieu d’un texte. L’écriture « littéraire » de Tabucchi est ainsi remplacée par un système très visuel, efficace. Cette recherche se retrouve aussi dans le dessin, bien plus lâché que dans les œuvres précédentes de Gomont, voire épuré, aussi bien au niveau des décors que des personnages. Le résultat est superbe.
NDZ
C'est vraiment très très bien. Alors… La difficulté, quand on n'a pas lu le roman, c'est de deviner quelle est la réelle part de l'adaptation dans la réussite (je suis dans Tritano meurt de Tabucchi, je vais donc faire l'exercice dans une position encore plus qualifiable d'équilibriste). En même temps, même si le roman est bien, ça n'enlèverait pas grand chose non plus à l'adaptation. Éternel problème.

J'ai beaucoup apprécié que tous les échanges soient des dialogues entre seulement deux personnages (ou personnage-conscience, personnage-objet, personnage-souvenir). Je ne sais donc pas si cela vient du roman ; mais l'effet « duel » est d'autant plus visuel en bande dessinée : duel avec le jeune, avec la concierge, avec le médecin, etc.

Pas d'effets de groupe, pas de discussion publique. Au moindre regroupement, on se tait (exception faite du « trio » lors du bal). C'est l'effet dictature, c'est l'effet « on n'est sûrs de personne ».

Du coup, l'éveil à une conscience politique chez un homme d'âge mûr et solitaire est d'autant plus touchant qu'il se fait sous forme d'un huis-clos mental. Et au final, la question qui viendrait à l'esprit sous la forme « est-ce que l'acte final de Pereira est de l'Engagement au sens fort ? » est secondaire. Et heureusement car le cheminement de la pensée, de la conscience et l'articulation entre confort individualiste et action collective sont les seules choses réellement dignes d'intérêt.

Concernant le dessin, Portugal (voire Italie) oblige, j'ai eu un sentiment diffus d'être en terrain connu (Pedrosa, voire Alfred). La mise en couleur m'a parfois fatigué, pastel, contours diffus, silhouette, là, on appuie un peu trop la note. Mais certaines compositions m'ont réellement replongé dans Histoire du siège de Lisbonne (Saramago) que je venais de refermer, c'est dire si c'est quand même efficace.

Une des belles lectures de l'année, et il n'y en a pas eues tant que ça en 2016, qui donne envie d'aller lire les autres livres de l'auteur. Tabucchi ? oui, mais Gomont aussi.
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