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| La vie et l'œuvre de Windsor McKay. Ses débuts de portraitiste au Wonderland (célèbre parc forain de Detroit dans les années 1880), ses cours de perspective et sa recherche de la quatrième dimension, ses rencontres extraordiaires (le magicien Houdini) et ses aventures dans l'ouest américain, le succès de Little Nemo in Slumberland dans le Herald Tribune de Chicago, etc... |
  thyuig
| Il y a quelque chose de précieux dans cette bande dessinée, une douceur perceptible, sans doute produite par la beauté du dessin de Bramanti, son côté vaporeux, comme une apparition éphémère. La difficulté d'aborder un personnage tel que Windsor Mc Cay pour un auteur de bande dessinée est sans doute la même que celle d'un footballeur (c'est de circonstance) devant rendre hommage balle au pied à l'un de ses prédécesseurs. Une impossibilité figée dans le temps, un passé qu'on ne connaît qu'au présent, un souvenir en somme.
Finalement il ne s’agit que d’une équation simplissime : nous parlons au présent d’un passé qui le détermine (ce présent) dans son futur. Elémentaire. La bande dessinée doit son existence moderne à Mc Cay et lorsqu’elle lui rend hommage, c’est ses entrailles qu’elle retourne.
Et nous nous faisons tout un monde des entrailles ; il n’y a franchement pas de quoi. Ca n’est jamais que le germe de l’existence. C’est justement à cette dernière que Smolderen et Bramanti ont décidé de s’intéresser. La vie de Mc Cay. La naissance d’un art. Tout un programme.
« La balançoire hantée » relate les premiers pas de dessinateur d’un élève très doué. Il étudie la perspective auprès d’un maître et gagne sa vie en faisant le portrait de badauds se rendant au Wonderland de Détroit, une attraction mêlant illusionnisme et spectacles comiques. La balançoire en question est un appareil dans lequel les spectateurs prennent place. Elle est au centre d’une pièce mobile, dans laquelle le mobilier a été cloué au plancher. Evidemment la pièce tourne autour de la balançoire cependant l’illusion opère à merveille pour les spectateurs, à se retourner les sens.
La justesse du traitement conjoint de Smolderen et Bramanti réside ici, dans cette faculté implacable de rendre compte de l’exacte vie de Mc Cay, sans chercher à l’enjoliver, mais ainsi de rendre palpable l’exercice même évoqué plus haut, la mise en abîme de la bande dessinée elle-même avec comme point d’achoppement cette balançoire d’illusion, celle qui nous fait croire que l’on tourne dans l’espace alors que c’est l’espace qui défile sous nos yeux.
Le tout provoque une sorte de vertige. D’illusion bien sûr. Mais aussi temporel, spatial et esthétique. Temporel par ce retour dans le passé de la bande dessinée et en utilisant ses moyens propres. Spatial parce qu’il y est question de la quatrième dimension laquelle figurera au centre des préoccupations de Mc Cay. Et bien sur esthétique dans le traitement particulier de Bramanti. Son dessin souligne et efface à sa guise les éléments du réel, il les façonne. L’impression est un peu celle qu’on ressent lorsqu’on cherche à se souvenir d’un rêve. Certains protagonistes nous reviennent amputés de leur tête, ou seulement au travers du bruit de leurs pas. Bramanti agit comme cela, en esquissant certains décors, en recouvrant d’un voile de brouillard certaines planches. Magnifique mais surtout nécessaire. Le voile historique, le flou artistique, tout cela est indispensable pour l’équilibre de l’œuvre, pour palier au vertige de Mc Cay, à son déséquilibre ; spatial, temporel, esthétique, mais surtout artistique. Magnifique.
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