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| Ça ne pouvait pas durer. À force de tirer sur la ficelle, tout devait bien finir par se casser la gueule. La sourde menace qui guettait, je ne l'ai pas entendue venir...
Elle est arrivée dans mon dos, sans bruit, sournoisement. La folie qui veut que l'homme s'en prenne à ses propres congénères, quand le pouvoir devient une drogue... Pour ma part, je n'ai rien oublié de ce qui m'a amené ici. Et puisque j'ai maintenant un peu de temps devant moi, que je ne suis plus sur la brèche, commençons par le commencement... |
  MR_Claude
| Chronique réalisée dans le cadre du focus sur Kuklos.
Noir c'est noir.
Sans mauvais jeu de mots ou référence musicale de mauvais goût, c'est le mot qui convient à l'ambiance de ce récit. Sans hésitation, Gaultier et Ricard font mieux que transformer l'essai de Banquise, qui, bien qu'intéressant, souffrait de quelques défauts.
Le dessin, j'aime bien. Il peut rebuter, mais il a une vraie personnalité, un caractère. Plus que dans Banquise encore, les hachures sont là pour suggérer les volumes, les contrastes, les lumières, et c'est parfois très impressionant. Le format de l'album joue également, cela aère les planches, se lit avec facilité, un format plus classique aurait été chargé avec ce type de découpage. Les couleurs quant à elles sont très différentes de celles de Banquise, plus naturelles, moins d'effets, mais là encore, un joli travail sur les lumières.
Un petit bémol sur la couverture qui n'est pas des plus attirantes à mon goût, mais un gros plus sur la scène presque centrale du cauchemar. Son traitement graphique différent du reste, halluciné et hallucinant, nous donne 4-5 pages à couper le souffle.
Le récit quant à lui est du même noir que ces contrastes. Je ne vourdais pas trop déflorer l'histoire, l'immersion totale et la découverte me paraissant préférable pour le lecteur.
Ricard est un fan de Scorsese, il le dit, et ça se sent. Ses dialogues et voix-off sont souvent très bien sentis, dans l'esprit du genre, sans être caricaturaux. Et surtout, le gros écueil de l'histoire moralisatrice est évité. C'est moins une histoire sur le Ku Klux Klan qu'une sorte de "guerre des gangs". Plutôt que de sombrer dans une dénonciation facile car trop évidente, on a un récit dur et sombre, violent, sans jugement mais sans compassion non plus. Centrée sur un personnage et non sur le Klan, l'histoire gagne en force. Ricard ne fait pas tenir aux klanistes et aux noirs de discours idéologique, il les fait agir, ça suffit grandement. L'autre écueil était du coup de ne faire du Klan qu'un prétexte, ce qui me semble évité. Le tout est cohérent.
Au final, un très bon moment de type "roman noir américain". Un récit dense sur 80 pages, sombre, sans morale excessive mais sans complaisance. C'est pas du Scorcese, c'est pas du Ellroy, mais c'est vraiment bien quand même! |
crepp
| Chronique réalisée dans le cadre du focus sur Kuklos.
Etrange Fruit
Les arbres du sud portent un étrange fruit,
Du sang sur les feuilles, du sang aux racines,
Un corps noir se balançant dans la brise du
Sud,
Etrange fruit pendant aux peupliers.
Scène pastorale du « vaillant Sud »,
Les yeux exorbités et la bouche tordue,
Parfum du magnolia doux et frais,
Puis la soudaine odeur de chair brûlée.
Fruit à déchiqueter pour les corbeaux,
Pour la pluie à récolter, pour le vent à
Assécher,
Pour le soleil à mûrir, pour les arbres à
Perdre,
Etrange et amère récolte.
Ceci est la traduction du poème que l’on trouve dans Kuklos. Il est de Lewis Allen, et peut être certains mélomanes ont-ils entendu une version chantée par Billie Holiday. Si je le mets dès le début de cette chronique, c’est qu’il résume parfaitement l’ambiance qui se dégage de cet album. Il vous parlera beaucoup plus que mon simple avis.
Sylvain Ricard et Christophe Gaultier nous refont donc un one shot de toute beauté. Il était pourtant difficile de faire aussi bien que « Banquise » (j’adore Banquise !).
Kuklos nous parle des heures sombres de l’histoire américaine, il raconte la vie de Thomas, de son envie d’être dans un ordre grand et fort : le KKK. Nous allons donc suivre son ascension dans ce groupuscule (son entrée dans le clan est magistrale !). Nous allons voir comment ses hommes sont soi-disant tous unis pour combattre le même but.
Mais au-delà de l’histoire d’un homme, les auteurs nous font descendre en crescendo vers les enfers et la bassesse humaine. Accrochez-vous, car la violence devient dure au fils des pages, mais elle est maîtrisée, elle n’est pas là pour faire jolie, elle est nécessaire.
Tout est sombre dans cet album, il n’y a pas de bouffée d’oxygène. Les dialogues de Sylvain Ricard sont coupants comme la lame d’un rasoir, quant au dessin de Christophe Gaultier, il est "hachuré" de façon à rendre l’album encore plus noir, plus dur.
De cette histoire il n’y a pas de gagnants, juste des ratés.
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Matthieu
| Même si le "Mal" et son fonctionnement est une des composantes majeures du scénario de Kuklos, on est très très loin de la dualité Bien/Mal de certaines histoires moralisatrices bas de gamme. Sylvain Ricard et Christophe Gaultier s'intéressent dans la première moitié de l'album aux causes qui peuvent pousser certain vers des idéologies et des crimes les plus odieux qui soient. Tout en dénonçant les assassinats racistes, ils nous montrent l'importance du conditionnement dès l'enfance et l'influence de l'environnement extérieur. En connaissant le passé du personnage principal, on découvre son humanité, on en arrive à être troublé du fait qu'il ne semble pas aussi éloigné de nous qu'on pourrait l'imaginer. Apres ça, difficile de dire si l'histoire finit "Bien" ou "Mal". Il n'y a pas de morale au sens premier du terme. Même si l'album est définitivement anti-Klaniste elle reste amorale dans le sens ou elle ne donne aucune réponse, mais elle nous oblige à nous questionner, à s'impliquer dans le récit.
La narration par voix-off et le dessin aux ambiances très fortes obligent le lecteur à plonger littéralement dans la bande dessinée qui ne peux échapper a la "claque" et à toute la violence physique ou mentale subie par les personnages qui va en crescendo.
Une œuvre a la fois forte, intelligente et faisant preuve d'une très grande maturité des 2 jeunes auteurs.
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nyl
| A la lecture de Kuklos, j'ai eu la sensation que j'avais les yeux qui grossissaient au fur et à mesure. Parce que je trouvais que ça sentait trop le vrai, et un vrai qui sent pas bon. Parce que si mes yeux n'avaient pas grandi comme ça ils se seraient fermés pour que je ne puisse pas voir. c'est tellement plus simple de ne pas voir.
Et le pire, c'est pas l'histoire de ces gens qui se tapent dessus (parce que ça ça ne me touche plus). C'est la façon dont c'est traité, d'abord du point de vue des sensations. Ces gens qui sont plein de haine. Pourquoi? Parcequeeeeee... comme dirait quelqu'un. Et seulement parceque, parcce que c'est comme ça. Et puis parce que qu'une fois que t'as mis la cagoule dans la forêt par une belle nuit de printemps, tu peux plus laisser tomber la cagoule. Ces gens qui sont effrayés. Pourquoi? Parce qu'il y a des trous dans leurs cagoules et que ça leur permet de voir ce qui se passe. Ce qu'ils font. Enfin, pour certains les trous des yeux des cagoules ne sont pas assez grand, ou grandissent peu à peu.
Et puis il y a les autres. Ceux qui n'ont pas de cagoules. Ceux là, ils sont effrayés. Pourquoi? Parce qu'ils ont pas le choix. Et puis ils sont plein de haine ensuite. Poruqoi? Parce qu'ils ont encore pas le choix...
Pour moi Kuklos c'est tout ça et bien plus encore, surtout bien plus que l'histoire du kkk. Je ne sais pas comment les auteurs ont fait pour vous accrocher, pour réussir à aller au bout de cette histoire, mais ils ont eu raison de le faire!
Chapeau et merci... |
CoeurDePat
| Sans faire de jeu de mots hasardeux, on peut dire que "Kuklos" est un album très noir.
On commence par suivre le narrateur lors de son adolescence et sa découverte du Ku Klux Klan. Celle-ci se fait très naturellement : c'est pour lui à peine une découverte, c'est juste... logique.
Et puis le temps passe, et on le retrouve trente ans plus tard, toujours au sein du KKK, mais dans une situation plus élevée.
Ce qui frappe dans "Kuklos", c'est le côté narratif de la chose. A aucun moment il n'y a de véritable réflexion, de dénonciation ou d'approbation du racisme, de la violence... L'histoire est juste racontée, montrée, de façon finalement assez détachée malgré la violence qui pourtant suinte de partout.
Et les personnages sont violents. Tous. C'est d'ailleurs à mon avis un des points forts de cet album que de se concentrer là-dessus, le résultat est une haine omniprésente, sans fondement, sans tentative d'explication, rien que de la haine qui se nourrit d'elle-même.
Le ton de sylvain Ricard est décidément très particulier, très sombre, plus encore que dans "Banquise". J'ai parfois un peu regretté le dessin, par moment pas assez fort ou dynamique à mon goût, mais à dire vrai il participe pour beaucoup à l'histoire et à sa réussite.
Seul reproche, les passages narrés par la voix off, denses et importants pour l'histoire, mais qui créent une cassure dans le récit. Sans doute étaient-ils nécessaires pour faire tenir "Kuklos" en un tome (80 pages, quand même), mais bon, voilà, c'est un peu dommage quand même.
Bref, à lire ! |
pessoa
| Je vais faire tache au milieu du concert de louanges, mais je n’ai pas vraiment apprécié Kuklos.
D’abord, le scénario me paraît léger. Le mérite de Kuklos, de l’avis général, est d’éviter la dénonciation « simpliste », encore qu’en l’espèce une dénonciation sans nuance ne m’aurait pas gêné. Mais bon, ce n’est pas la question, jusqu’ici il ne s’agit que d’un parti pris intéressant de l’auteur.
Le problème est qu’en quatre-vingt pages il ne se passe pas grand-chose d’intéressant : le héros rejoint le Klan (au milieu de gars qui « cherchent une famille », fin de l’analyse, bravo), il s’oppose à un autre klaniste, une brute absolue, après quoi tout le monde bute tout le monde puis il y a une grande baston contre des boxeurs blacks et à la fin c’est les blacks qui gagnent. The end.
Quant au dessin, je le trouve particulièrement dénué de mouvement, et c’est dommage vu le nombre de scènes d’action. Pour ceux qui veulent un exemple, p52 : trois poings immobiles sont censés frapper un type également immobile, je suis désolé mais ça a du mal à passer !
Pour le prix (presque 20€, quand même), on a aussi quelques fautes d’orthographe, ce n’est pas gravissime mais ça fait bâclé.
Après ça, je dirais quand même que tout n’est pas à jeter dans Kuklos, mais je ne suis pas sûr que cet album quelconque mérite vraiment toute l’attention qu’on lui porte. |
Cellophane
| Oui, mais non…
Oui, le sujet est intéressant, bien traité, pertinent.
Non, parce qu’il a un côté vraiment anecdotique.
Certes, on voit un peu mieux le fonctionnement du Klan, mais l’histoire se résume un poil à une initiation, d’une part, qui est écartée au profit d’une histoire de vengeance, de compétitivité, d'autre part…
C’est très réaliste, c’est très crédible. Mais si l’histoire du Klan est intéressante, elle finit par être occultée par des histoires plus communes. Elles sont, d’accord, inscrites dans l’Histoire mais elles pourraient presque se trouver n’importe où…
Et puis les dessins ne m’ont pas convaincu.
J’ai plus deviné de qui on parlait que réellement reconnu les protagonistes…
Je suis peut-être passé à côté de la BD. Mais pour moi, elle est passée à côté de son histoire : celle d’un homme qui évolue au sein du Klan. On lâche cette idée pour une banale histoire de jalousie et vendetta. Dommage.
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