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| Gus a toujours un coeur d’artichaut quand il s’agit de femmes (aaaah, Nathalie !), Clem semble plus sérieux mais reste toujours tiraillé par ses amours et Gratt a tout du compagnon d’aventure toujours prêt à partir attaquer une banque ! |
  Pierre
| Voici Beau Bandit, deuxième tome de la série « Gus » dont la couverture fait un curieux écho à Fantômas. On retrouve ici tout ce qui faisait les défauts -ou les qualités c’est selon- du premier volume : facilité générale apparente, brio mis en œuvre pour ne rien dire ou si peu, savant dosage graphique alternant l'admirable et le bâclé. C’est du moins ce qu’on se dit à la lecture des premières pages.
L’Art pour l’Art c’est sympa, surtout au début. Alors Blain passe à autre chose. Il élimine le Gus dès le premier récit (brillant et vain) le muant in fine en improbable champion de poker pour mieux se focaliser sur la vie sentimentale de Clem. Clem c’est le rouquin avec une coiffure pas possible.
Alors voilà. Clem est dans une romance avec une jeune fille au long nez et au menton fuyant qui s’appelle Isabella. Elle a des petits seins et aime qu’on les lui tripote. Il l’installe dans une grande villa en plein désert, il lui fait croire qu’il vend des assurances. La fille n’est pas dupe. Elle devine ses véritables occupations et ça l’excite. Tous les deux ils baisent, ils se séparent, ils vont à cheval et ils rebaisent de plus belle. Ainsi s’écoule cette idylle, entre une attaque de train et un pillage de banque. Cependant, il s’avère que Clem doit faire face à des obligations inattendues. Parce qu’il a une autre femme -légitime celle-là- qui s’appelle Ava, et une petite fille qui habitent une petite maison dans la prairie…
Avec ce « Gus », contrairement aux apparences, Blain ne fait pas un western. S’il l’aborde, ce n’est pas en tant que genre mais plutôt comme un cadre hyper référencé (cinéphiles, ouvrez l’œil) dans lequel il transpose des préoccupations contemporaines et personnelles. Il en fait un terrain de jeu et d’expression complètement libre, entre autofiction et expérimentation.
Il y a là-dedans une densité incroyable qui consume les pages. Blain semble y évacuer un trop plein créatif, une tension interne qu’il tentait encore de canaliser dans les derniers « Isaac », une série devenue visiblement inadaptée à son humeur du moment. Ici, il laisse cours à ses fantasmes comme à ses angoisses en avançant sous le masque de Clem. Fantasme d’amour fou, de jouissance sans entrave avec Isabella. Angoisses face aux difficultés relationnelles avec Ava dans son couple légitime (Madame est écrivain, Monsieur bandit de grands chemins) mais surtout inquiétude face à cet enchaînement à la normalité sociale que représente une situation rangée, incompatible avec ses aspirations égoïstes de grand adolescent attardé (Dis papa tu me construis un carrosse ? Dis chéri, si on achetait une maison à San Francisco ? Le cauchemar quoi). Tout ça est ponctué de visions oniriques flippantes sous des couleurs irréelles à la Lucky Luke.
Alors pour le héros, quelle porte de sortie ? Un fantasme grandeur nature, mis à l’épreuve du réel, qui tourne carrément au délire. Son truc c’est les chapeaux haut-de-forme, Clem il kiffe trop. Et puis les fracs aussi et les masques. Il se créé une identité de bandit romanesque pour épater Isabella, une sorte de Fantômas. Echappatoire au double fardeau de la paternité et du mariage légitime ? Soif de reconnaissance ? Cela laisse présumer des doutes sérieux quant à sa santé mentale.
Ici, Blain fait plus ou moins la même chose qu’avec « Isaac le Pirate » mais il ne l’avait jamais fait comme ça. Le premier « Gus » était un test, un tour de chauffe. Une fois élargi le champ d’action, les infinies variations de la forme éclairent alors le fond sous un jour sans cesse nouveau. Enfin, Blain met son personnage en danger, et lui aussi par la même occasion. Comment va-t-il s’en sortir ? Suite au prochain épisode…
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