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| Gens de France et d'ailleurs |
| Gens de France (Gens de France et d'ailleurs #1) [Roman-Photo] | | Gens d'ailleurs (Gens de France et d'ailleurs #2) [Roman-Photo] | - | [18 récits inédits], [Roman-Photo] | |
  Thierry
| Je n'ai lu que les Gens de France dans l'ancienne édition Casterman. Cette chronique portera donc essentiellement sur cette moitié de l'intégrale qu'Ego Comme X a l'excellente idée de consacrer au travail de Jean Teulé. Ce touche-à-tout a d'ailleurs reçu le grand Prix de la Ville d'Angoulême pour cet album. Ironie du sort, il quittera définitivement le monde de la bande dessinée peu après. Il s'en explique indirectement dans le dernier portrait de son livre, consacré a "Happy Mike", caricature du geek bédéphile festivalier compulsif.
Par la suite, Jean Teulé promènera sa grande carcasse de Jacky-le-copain-à-Dorothée sur les plateaux de télévision, plus précisément avec ses 'petits bonheurs/petits malheurs' dans "Nulle part ailleurs" ou "L'Assiette Anglaise" de Bernard Rapp. Il se consacre désormais a la littérature et s'est essayé au cinéma.
A lire Gens de France, on se dit que Jean Teulé n'avait rien a faire dans le petit monde de la bande dessinée. Peut-on d'ailleurs qualifier son travail de bande dessinée ? Sous la forme de reportages illustrés de photos retouchées, il se livre a une exploration d'une France étonnante. Autant dire qu'il est a 1000 lieues des standards de la bande dessinée classique. Cette approche non-fictionnalisée du quotidien par le biais de la bande dessinée reste un cas assez unique, mis a part peut-être "L'os du gigot"
Le premier sujet est consacré a Jean-Claude, qui connut également la gloire d'un sujet dans l'émission "Strip-Tease". Souvenez-vous de ce brave type qui construisait une soucoupe volante dans son jardin parce qu'il voulait emmener sa mère sur Altaïr, le plus bel endroit de l'univers. Le ton est donné. Teulé se présente en observateur mi-amusé, mi-attendri par ce doux-dingue qui, aussi ridicule qu'il paraisse, mérite le respect pour s'accrocher ainsi a son rêve, aussi naïf soit-il. Au fil des rencontres, Teulé dresse des portraits tantôt drôles, mais jamais moqueurs, tantôt cruels de gens simples. Ainsi quelques faits divers dont une certaine affaire Grégory auquel il consacre quelques pages assassines ou l'histoire de cette adolescente mal dans sa peau qu'un vigile trop zélé de Mammouth poussera au suicide pour un soutien-gorge a 52 FF, et ce dans l'indifférence générale. Citons encore le cas de cette femme à qui on a volé une pièce de son appartement, de ces parents qui profitèrent de la mort de leurs enfants pour s'en mettre plein les poches ou encore les considérations de Teulé sur Baudoin, médiocre peintre de mairie du XIXe qui a bercé son enfance.
Teulé ne se laisse jamais aller au sensationnalisme, même lorsqu'il s'attaque a des faits divers. En refusant de céder a l'émotion du moment, il les désacralise, s'intéressant plus a ce qu'ils révèlent. Son sujet sur les soeurs Papin en est un bel exemple. Il préfère brosser un portrait décalé de cette fraction de la société française que certains ont baptisé, non sans condescendance, "la France d'en bas". Sans méchanceté, mais parfois avec ironie, voire colère, avec humour, tendresse et poésie, Gens de France nous rappelle que la bande dessinée peut-être tellement différente qu'un passe-temps pour adolescent boutonneux ou une passion pour des puceaux de 40 ans qui se désolent de ne pas posséder tout les sucres carres a l'effigie de "Largo Winch". Bien sur, cette intégrale coûte un peu chère, mais le contenu vaut largement la dépense. Une belle occasion d'appliquer l'adage "Achetons mieux, achetons moins" ! |
cubik
| Ah il est fort, Jean Teulé.
Pourtant, il a pas l'air comme ça, avec sa grande carcasse, sa frisouille et sa bouille d'éternel gamin. Encore moins avec son bouquin cher, qu'au prix et à l'éditeur, on pourrait penser qu'il est pêteux et que c'est plus de la photo illustrée avec du texte que de la bd avec des beaux dessins et des bulles. N'empêche qu'il est fort.
Il bat les villes et la campagne et il en ramène toujours quelqu'un d'intéressant.
Il montre des gens qu'il aime, qui l'énervent, qu'il déteste, en tout cas qui l'intéressent. Il les montre pas forcément tels qu'ils sont mais tels qu'il les voit. Et son regard les rend vivants, presque audible par moment. Il arrive à nous les faire entendre, à nous les rendre familier, à montrer des gens et pas de simples sujets de reportages.
Et du coup, il émeut, il énerve, il fait peur. Il fait rire aussi parfois.
Il nous montre que les originaux sont pas forcément les moins compréhensibles ou les plus cons.
Je ne sais pas comment il fait. Mais il est fort, Jean Teulé. |
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