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  thierry
| Il y a chez Chaland un art consommé du contre-pied.
Son style graphique évoque les années 50, dans ce qu'elles peuvent avoir de plus rassurants dans l'inconscient collectif, plus encore à la bande dessinée des années 50 qui mettait en scène un monde aseptisé et asexué. Mais les bandes dessinées de Chaland et Yann en sont bien éloignées.
Du trio d'(anti)-héros, ils introduisent, au côté de Freddy et Sweep, plutôt caricaturaux dans leurs atours de boy-scouts gentils mais un peu épais, la belle Nina, femme de tête, sexy et volontaire... une hérésie pour la bande dessinée des années 50 !
Ce F-52, avion atomique révolutionnaire, rappelle l'avion stratosphérique de Jo et Zette (quoiqu'il faille plus y voir une source d'inspiration commune de Chaland et Hergé: Science & Vie qu'un hommage direct à Hergé). Cet avion évoque en filigrane un symbole du progrès technologique prisé dans les années 50. la science était perçue comme une marche en avant pour la société et l'énergie nucléaire comme l'avenir. Il a aussi un petit air de Titanic, même s'il n'est pas promis au même destin.
Mais derrière cette façade rassurante, il y a une profonde misanthropie, qui doit probablement aussi beaucoup à Yann... des personnages souvent irritants, comme cette famille nombreuse aux enfants infernaux que l'on aurait envie de balancer par le hublot. Nous avons tous dû souffrir de la présence de tels énergumènes lors de longs trajets.
Comme au »"bon vieux temps, l'intrigue semble tourner autour d'une affaire d'espionnage à l'ancienne », avec un espion du KGB en imper et grosses chaussures à semelles truquées. Mais cette intrigue n'est finalement que très accessoire. Les auteurs s'intéressent surtout à cette histoire cruelle d'une jeune veuve voyageant en seconde classe dont la fille est « échangée » avec l'enfant trisomique de parents voyageant en première classe. Loin des histoires très « bibliothèque verte » que l'on attendrait, mais une vraie histoire cruelle et dérangeante, qui introduit même une notion d'injustice sociale loin de l'image d'Epinal de la société fantasmée présente dans la bande dessinée des années 50.
Donc, tout cela ressemble à cette bande dessinée aseptisée du beau journal de Tintin, mais le résultat est beaucoup plus riche et complexe. Beaucoup plus dérangeant, aussi. Mais tous ces ingrédients disparates se marient parfaitement. L'équilibre est parfait.
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