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| TerreNoire réédite une des premières bd de JM Bertoyas racontant le parcours d'un jeune garçon (appelé « ducon » par son père alcoolique) qui essaye de se faire un peu moins chier dans la vie...
On le voit se faire balourder par sa copine La Face « Putain… quand je pense que j'ai couché avec ce mec ! », être pote à la vie à la mort avec un dissident sac de jute trasheur. ..
Un gros bordel graphique comme d'habitude avec Bertoyas, où cette fois-ci les dessins à la Pim Pam Poum sont bouffés par des rebords de cases pirates et autres ellipses graphiques qui parasitent la lecture autant qu'elles lui donnent de l'épaisseur. |
  L M
| JM Bertoyas, grand spécialiste de la BD pas normale, livre ici son livre le plus construit – il faut préciser que tout son travail apparaît comme une grande entreprise de déconstruction des codes ; ce « ducon » est un de ses premiers livres (il auto-publie la plupart), ce qui explique peut-être son très relatif « classicisme » (!!!). Ici, il arrive à rendre très réelle l’histoire de ce petit gars nerveux dont on ne distingue jamais vraiment les formes du visage, sujet à toutes les tuiles possibles par excès d’enthousiasme ou d’inexpérience : un vrai récit d’apprentissage, en somme…
On est cependant sans arrêt sur le fil du lisible et de l’abstraction formelle (feuilleter le livre n’en dit pas grand-chose ou rien du tout). Un peu partout des traits de rebords de cases virtuelles ou saoules ; les personnages comme leurs textes ont des coulures ou des pointillés (sortes d’embranchements électriques) sur le visage ; les traits d’avant plan, d’arrière plan, de bulles, de rebords de case, sont enchevêtrés comme dans une dimension inconnue ; les situations s’enchaînent selon des desseins impénétrables (ce n’est pourtant rien en comparaison de « comix » plus récents, qui enchaînent quasiment de case en case les situations et la manière de le faire ahurissantes – Princesse, paru chez les Requins Marteaux, est déjà plus déglingué, mais on peut supposer que ce travail de déconstruction va s’amplifier jusqu’à , peut-être, une magnifique abstraction qu’on supposerait incompréhensible mais pourtant irrésistiblement drôle).
Du coup, il y a là une fraîcheur totale, une fascination comparable à certaines lectures d’enfance inintelligibles ; pour beaucoup dû à l’absence quasi-totale de référence - les emprunts à la « petite Lulu » ou autres, carrément décalqués, sont quand même largement « transcendés » et il n’en reste vraiment pas grand-chose qui pourrait nous faire savoir sur quel terrain on est.
L’humour à priori débile est contrecarré par la difficulté qu’il peut y avoir à le lire, la simplicité bonne enfant des personnages est balancée par de pleines pages de citations de Karl Marx, l’amusement n’y sacrifie pas à l’édulcoration (beau et rare rendu des sujets « prolétariat », « alcoolisme » et « enfance pourrie », entre autres) ; trop bizarre, trop « artistique » pour être « populaire », mais sans doute trop rural ou gros sabot pour plaire à un milieu artistique habitué à plus de classe. Loin de se vautrer devant la télé, les personnages de Bertoyas semblent être conscients que leurs quelques libertés peuvent servir à autre chose, et tentent d’en profiter au maximum. Très réjouissant, y compris pour les gros blasés : chapeau.
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