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| Nicolas Presl plonge dans le passé et nous transporte dans une des pages les plus noires de l’histoire humaine en s’intéressant aux croisades et aux premières colonies. En convoquant les figures (mythiques ou réelles) et les moments les plus sombres de l’Histoire, et en mettant en parallèle plusieurs moments qui ont vu se faire l’asservissement de l’homme par l’homme, l’auteur crée un fil conducteur entre ces périodes où la barbarie fut érigée en système, avec comme point d’entrée les « divines colonies »… |
  thierry
| Après un Priape prometteur qui évoquait les tragédies antiques, Nicolas Presl revient avec Divine Colonie, un récit dont l'ancrage dans l'Age d'Or de l'Espagne coloniale ne doit pas dissimuler sa dimension universelle. Un jeune noble, élevé dans un environnement fermé, à la fois surprotégé et étouffé par une éducation rigoriste, se perd dans la contemplation d'un triptyque qui, entre le jardin d'Eden et les Enfers, exalte un certaine forme de piété naive et idéale. Écartélé entre un idéal de pureté catholique et un désir charnel mal maitrisé qui lui inspire des cauchemars terrifiants, le précipitant dans les Enfers tels que représentés sur son triptyque, il croit reconnaitre dans l'exhibition d'un couple de "sauvages" ramenés des colonies les enfants du Jardin d'Eden.
Convaincu d'y trouver les réponses aux questions qui le tourmentent, il embarque pour les colonies, qu'il pare d'un aura quasi divin. Mais, non seulement il n'y trouvera pas la jardin d'Eden tant espéré, il y sera également témoin des pires atrocités, commises par ses semblables. Ses certitudes vacillent. Incapable de trouver ses marques dans ce monde en pleine déconstruction, il perd pied. Il s'abime dans des hallucinations fievreuses ou, flanqué du poète Virgile, il assiste, impuissant, à d'autres massacres passés et à venir, perpétrés par d'autres civilisations "dominantes". Quel sera l'impact de ses visions sur la santé mentale de cet homme tourmenté et en quête de sens ?
Récit initiatique qui tourne au cauchemar pour un jeune homme que sa quête de sens va confronter a la dureté de la réalité et aux limites de son système de valeurs, profondément marque de culpabilité chrétienne et d'un sentiment de supériorité sur aux non-chrétiens, cette "Divine Colonie" prend toute son ironie dans les dernières planches.
Comme dans Priape, Nicolas Presl compose un recit muet, exprimant les non-dits au moyen de l'image. Approche risquée lorsqu'elle se répète sur pres de 300 pages. Mais la cohérence de son propose et la précision de sa narration lui permette de relever le defi avec brio. Il fait plus que confirmer tout le bien que l'on pensait de lui après la sortie de Priape. La bande dessinée muette est une alchimie delicate, dont l'équilibre peut s'effondrer rapidement si les images ne parviennent pas à traduire les sentiments qui animent les personnages. Entre l'exces de signifiance qui debouche sur des personnages et des situations outrés qui deforcent l'ensemble, et l'hermétisme decoulant d'images trop symboliques que le lecteur ne peut que difficilement traduire, la frontière est tenue. Le travail de Nicolas Presl se situe exactement sur cette frontière. |
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