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| La bataille du Mont Fuji et autres aubergines |
En 2026, le Mont Fuji est le théâtre de tragiques événements. Qui aurait cru qu’un jour, des aubergines géantes venues de l’espace envahiraient la Terre ? De retour à notre époque, M.Takama se trouve lui aussi menacé, mais, plus modestement, par un ours. La jeune Sanaé est quant à elle occupée à suivre, via sa messagerie Internet, le récit des aventures indiennes de son ami Arino, lassé de la cuisine au curry.
On croise aussi un peloton de cyclistes – aperçus dans le 1 er tome – et un camionneur tiraillé entre sa femme et sa maîtresse.
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  herbv
| Avec la sortie du troisième et dernier recueil de nouvelles ayant les aubergines comme fil directeur on pouvait se demander si Iô Kuroda, l’auteur, arriverait à garder le niveau d’excellence atteint dans le second volume ?
La première histoire, où un chantier industriel rentre en conflit avec une race d’aubergines géantes tueuses, ne permet pas de trancher. Elle se révèle plaisante à la lecture mais on sent que l’auteur n’est pas parfaitement à son aise dans les thèmes de l’épouvante et du fantastique. Son histoire ne réussit pas à créer la tension dramatique ou l’atmosphère burlesque indispensable à ce type de sujet.
La seconde est nettement plus intéressante car on retrouve Takama, le professeur d’université qui préfère être cultivateur d’aubergines. Un ton doux-amer qui fait mouche, la mise en exergue de l’égoïsme de chacun d’entre nous en fait une nouvelle qui touchera le lecteur sensible à l’œuvre du mangaka.
La suivante aurait pu être aussi réussie mais elle est gâchée par une narration assez confuse, reposant beaucoup sur la géographie locale. Et le fait d’avoir laissé tous les textes originaux avec des renvois en bas des cases pour la traduction, alors qu’il y avait largement la place pour une adaptation graphique, nuit encore plus à la fluidité de la lecture (lettrage professionnel et Sakka, ça a fait souvent deux) et pourra faire décrocher le lecteur, même des plus motivés.
La quatrième nouvelle ne présente pas beaucoup d’intérêt si ce n’est qu’on voit que prof. Takama vieillit et que les ours peuvent être dangereux pour les fermiers isolés. On n'arrive pas un seul instant à se sentir concerné par cette histoire et à vibrer pour le personnage principal. Action minimaliste et niveau de réflexion zéro caractérisent cette nouvelle qu’on s’empressera d’oublier.
Malheureusement, la descente aux enfers de ce recueil n’est pas terminée. Si la cinquième nouvelle a l’avantage d’apporter du dépaysement, la narration confuse de cette tranche de vie d’Arino en Inde empêchera d’apprécier cette histoire. Outre une histoire peu crédible car on n’arrive pas à la concevoir comme un rêve ou un conte de fées, il faut reconnaître que le personnage d’Arino est particulièrement passif et même vide, sans intérêt.
Heureusement, le fond a été atteint et avec l’avant dernière nouvelle, on assiste à un rétablissement spectaculaire de la qualité de l’histoire. Il faut dire que le cyclisme semble inspirer notre auteur. Et une fois de plus, c’est à une réflexion sur la valeur de la victoire sportive qu’il nous invite et c’est très appréciable même si le lien avec les aubergines est des plus distendu.
La dernière nouvelle est sans conteste la meilleure car elle sait à la fois clore le recueil tout en restant ouverte et laissant l’esprit du lecteur vagabonder entre différentes fins possibles. On y retrouve prof. Takama à qui on propose une place à l’université de San Francisco, Aya qui a gagné un million de yens (soit plus de 7000 euros) et qui ne sait pas comment les dépenser, ainsi que Mlle Onishi, la cadre supérieure dynamique qui vient prendre des cures de sommeil à la ferme. L’auteur revient ainsi au questionnement principal du premier volume, c'est-à-dire la difficulté de changer, d’entreprendre malgré une réelle insatisfaction de la vie proposée.
La boucle est bouclée, la réponse doit être trouvée par le lecteur, comme les deux dernières planches du recueil nous le montrent. |
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