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  THYUIG
| Deux hommes dans un terrain vague attendent un hypothétique coup de téléphone.
Le premier homme est grand et mince tandis que le second à l'opposé, est petit et gros. L'un est vif et bavard, l'autre lit Proust ou écrit quelques notes dans un carnet selon l'humeur.
Et puis?
Et puis rien. Bézian adapte à la bande dessinée le huis clos théâtral cher à Beckett. Très écrit, cette suite de dialogues savoureux se déguste sans amertume. Quelle jubilation de voir et d'entendre ces personnages tour à tour hésiter, se méprendre, se déchirer, aller et venir sur cette scène!
Bézian monte en épingle une situation inextricable, absurde (deux hommes attendent déséspérement que d'une cabine téléphonique retentisse une hypothétique sonnerie, synonyme de libération). S'il sonne, nous sommes libres mais finalement, tandis que nous attendons qu'il sonne, nous en sommes on ne plus les esclaves enchaînés. Asservis à une conjecture.
Et c'est cette hypothèse de la fuite, celle que partagent le lecteur et les deux personnages, qui fait de cet "archipels" une démonstration époustouflante du talent de Bézian. Tant que nous envisageons la possibilité d'une sonnerie, d'une soustraction à cette attente, nous sommes liés à ses hommes, condamnés à espérer le même dénouement qu'eux.
La justesse de la situation associée au talent graphique de Bézian font de cette absurdité l'une des bande dessinées les plus maîtrisées qui soient. Les scénettes se découpent si facilement que pour nous, lecteurs, la limpidité du dénouement ne semble pas faire de doute.
Et pourtant, Bézian nous prend à contre pied, nous trompe tout comme il trompe ses personnages. Qu’attendiez-vous au juste ? Un coup de téléphone ? Vraiment ?
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