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  charlie brown
| Je ne parlerai ici que de la bande dessinée stricto sensu. Je n’ai pas pris la peine de lire préface, avant-propos, postface, appendices et autres notes, qui me semblent de peu d’intérêt en regard de l’œuvre elle-même (en plus, je l’ai lue en anglais, alors je n’avais pas le courage de faire l’effort supplémentaire ! Mouahah.).
Ce que j’aime par-dessus tout chez Chester Brown, c’est sa complète honnêteté intellectuelle. Mais aussi sa capacité à raisonner froidement, tout en réussissant à faire partager ses sentiments et ses émotions. Le tout sans jamais tomber dans le glauque ou le graveleux, en faisant preuve d’un humour bien dosé (j’adore les cases muettes) et d’un recul sans complaisance, mais jamais blessant, ni pour lui, ni pour les autres.
C’est ainsi qu’il s’attaque à ce nouveau versant autobiographique de son œuvre : l’amour tarifé. Comment il en vint à fréquenter des escorts pour satisfaire sa vie sexuelle (et sentimentale, si si !), alors au point mort, voire au point de non-retour.
C’est en effet trois ans après que sa troisième petite amie, Sook-Yin, l’a quitté (hilarant chapitre 1), qu’il se décide à tenter cette expérience, non sans avoir d’abord devisé de sa démarche et de ses réflexions avec ses amis Seth et Joe Matt d’une part, avec une de ses ex-compagnes et meilleure amie d’autre part. C’est ce qui est le plus intéressant chez Chester Brown : le cheminement. Non seulement le pourquoi, mais aussi le comment. Il passe par tout un tas de réflexions que tout homme a dû se poser au moins une fois dans sa vie, et il les expose avec une grande clarté. Il questionne aussi beaucoup la notion d'amour...
Un des aspects les plus intéressants du livre, c’est d’ailleurs d’exposer le point de vue du client. Chose que j’ai rarement vue dans ce domaine. Je veux dire que, souvent, quand on aborde le sujet de la prostitution, on s’attache soit à l’image et à la condition de la prostituée dans la société, soit à la vie de la prostituée elle-même. Mais on expose rarement le point de vue du client (enfin il me semble en tout cas...)
Chester Brown est un homme cultivé et intelligent, certes, mais c’est surtout un homme sensible et délicat, respectueux et compréhensif. Ses discussions avec les différentes filles qu’il rencontre ont aussi un aspect éclairant, à la fois sur la condition d’escort-girl et sur celle de la société occidentale (et particulièrement américano-canadienne) dans laquelle elles évoluent. Mais c’est un point annexe de l’aventure (c’est d’ailleurs pourquoi cet aspect des choses, peu abordé en tant que tel dans l’œuvre elle-même, a dû être rejeté et développé en annexe…). On pourrait reprocher à l’auteur de ne traiter que d’une seule sorte de prostitution - celle, librement exercée, dans des conditions d’hygiène et de sécurité relativement acceptables - mais ce serait faire un reproche dénué de fondement : Chester Brown parle d’abord et surtout de son expérience personnelle, qu’il inscrit dans un projet autobiographique sans fard. Après, on aime ou on n’aime pas ce genre d’exercice. Moi, j’avoue que quand c’est d’une telle qualité, d’une telle pudeur (si si, quand même) et d’une telle acuité, eh bien je suis preneur.
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