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© Cornélius

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NonNonBâ
ScénarioMizuki Shigeru
DessinMizuki Shigeru
CouleursNoir et Blanc
Année2006
EditeurCornélius
CollectionPierre
SérieOne-shot !
Bullenote [détail]

NonNonBâ, une vieille dame mystique et superstitieuse qui aime à raconter des légendes étranges, est accueillie dans la famille du jeune Shigeru. L'imaginaire déja débordant du garçon s'en retrouve décuplé. Les histoires de fantômes et de yokaï deviennent son univers quotidien et prennent le pas sur la réalité. Bien sûr, ce deuxième monde chasse l'ennui du premier, mais en contrepartie, il complique tout : il est déjà bien assez difficile de savoir à qui se fier, sans qu'en plus des petits monstres bizarres viennent s'en mêler...

 

3 avis

martin
Quand Cornélius, éditeur alternatif par excellence, se met au manga, on ne sait que penser. Est-ce la fin de tout ? Cornélius cède-t-il aussi à cette facilité éditoriale et révèle-t-il ainsi son vrai visage de marchand ? On peut légitimement s'inquiéter d'une telle dérive d'autant plus que le catalogue Cornélius a lui aussi son Tezuka (il faudrait d'ailleurs féliciter la personne responsable de cette présence de Tezuka chez le plus grand nombre d'éditeurs francophone).
Ah homme de peu de foi ! Non ce n'est pas cette fois encore que Cornélius faillira à ses principes d'exigence. Car il faut bien dire que la lecture de NonNonBâ est aussi réjouissante que son édition utile.
NonNonBâ apparaît à première vue comme un répertoire de yôkai (sorte de fantômes), mais au-delà de l'aspect folklorique, NonNonBâ est surtout à travers une chronique familiale et rurale un récit d'apprentissage (par la mort et le deuil notamment présents sous toutes les formes) dans lequel l'auteur nous conte sa jeunesse dans un village de bord de mer en 1930.
A travers une série d'épisodes sans construction romanesque apparente, Mizuki avançant lentement au fil des interrogations et des découvertes de l'enfance, nous montre comment sa personnalité a été marquée par deux figures majeures : NonNonBâ une personne âgée, pauvre et religieuse, et par son père un employé de banque peu zélé et plus attiré par les lumières de la modernité.
De la première, il découvre le monde des esprits, celui de la tradition en fait. Mizuki enfant est alors le dépositaire d'un savoir ancien que son aînée lui transmet oralement.
Du second, son père, il reçoit l'encouragement à devenir ce qu'il veut mais surtout celui-ci représente pour le jeune Mizuki le progrès et la modernité dans lesquels le Japon s'engage.
Et Mizuki enfant se construit ainsi entre passé et futur, entre tradition et progrès. Plus que les yôkai eux-mêmes c'est finalement cette manière d'interroger son histoire, de la faire sienne et de la partager à nouveau qui est au cœur de NonNonBâ.
Cornélius en proposant une préface et surtout des annotations au cours de la lecture fournit au lecteur de nombreux éléments lui permettant de mieux appréhender une culture étrangère et complexe et d'enrichir ainsi considérablement sa lecture.
Au calme de la narration, Mizuki associe un dessin simple évitant les excès caricaturaux des mangas et dans lequel cohabitent sans complexe la caricature des personnages et le réalisme des décors.
NonNonBâ a tout du livre parfait tant dans sa forme que dans son fond. Malheureusement, sans atteindre la catastrophe du David Boring de Clowes avec une faute d'orthographe abominable dès la première page, il reste quelques coquilles (orthographe principalement, mais aussi petite incohérence dans les notes sur l'âge de Mizuki enfant par exemple) et un principe de non remplacement des onomatopées quelque peu erratique. Rien de grave mais d'autant plus agaçant que le livre est par ailleurs excellent.
Coacho
Enfin ! Enfin j’arrive au bout de mon calvaire !
420 pages plus tard, je suis enfin libéré !
A cause des innombrables louanges qui nimbaient la sortie de ce livre, je me suis laissé aller à mon penchant monomaniaque de bédéphile et je convertissais ainsi compulsivement 30 Euro en un bel album de chez Cornélius.
Maquette impeccable, superbe livre bien épais à la bonne odeur de papier de qualité, j’espérais que le contenu serait à la hauteur !
Et ben pan ! Heureusement, comme ce n’était pas très haut, je ne me suis pas fait trop de mal en tombant !
A quoi tient l’appellation de chef-d’œuvre ? C’est bien subjectif n’est-ce pas ?
Là, je suis vraiment abasourdi, et je ressens une très légère douleur au niveau de mon orifice inférieur…
Tout d’abord, toute personne s’intéressant un peu à l’informatique vous assurera que la police de caractère la moins inspirée est la Comic sans MS. Ben là, vous vous en tapez pendant 400 pages ! Ahahaha ! Je rigole mais ça use les yeux ça !
Et puis chez Cornélius, on s’attend à un soin tout particulier à la traduction…
Les commentaires de bas de case des idéogrammes se succèdent aux incessants allers et retours à faire aux notes (par ailleurs détaillées et bien faites) et vous permettent de muscler vos doigts ! Oui parce qu’il est lourd le pavé, dans tous les sens du terme !
Et pourtant, il y a bien des pages de grande qualité dans cet album qui nous emmène dans un Japon des années 30 à la découverte des mœurs d’une famille et d’une grand-mère aux visions quelque peu surnaturelles…
Mais dans la masse, ça s’affadit bien vite, pour ne donner qu’une sorte de récit un peu superficiel et grossement drolatique.
Bien entendu, ce n’est que mon avis, et il se peut que comme souvent avec le manga, je ne sais pas comment rentrer dans l’œuvre mais finalement, je constate seulement que je me suis ennuyé, que je n’ai rien appris, que je n’ai rien ressenti, et qu’ainsi appeler ce livre à devenir meilleur album d’Angoulême m’interpelle…
Surtout avec ces jolies fautes d’orthographe (de mémoire « Casserolles » p.141 et « On peux plus » p.337) qui, même si elles peuvent être des coquilles, m’ont encore heurté la pupille !
Non, vraiment, si je suis indulgent dans mon avis avec cet album, c’est bien parce qu’il est beau et qu’il conserve de très jolies pages. Mais globalement, je vous conseillerai de garder vos 30 Euro…
herbv
Avec la sortie de NonNonBâ, un des principaux auteurs japonais de bande dessinée est enfin traduit en français. Shigeru Mizuki est en effet considéré comme un monument vivant du manga même s’il est encore largement inconnu ici. Issu du monde de l’édition populaire de la région d’Osaka, l’auteur s’est rapidement spécialisé dans les histoires de fantômes, démons et esprits traditionnels japonais (les yôkai), même après être devenu un auteur à succès chez le grand éditeur Kôdansha. C’est grâce aux éditions Cornélius que la lecture d’un de ses titres récents, et tout à fait emblématique de l’œuvre du mangaka, nous est enfin proposée.

Ecrit au début des années 1990, le manga NonNonBâ est une fiction fortement teintée d’autobiographie. Située dans une petite ville de province, l’histoire se déroule au début de l’ère Showa (dans les années 1930). On y suit tout au long des quelques 410 pages l’éveil au merveilleux mais aussi à la dure réalité de la vie de Shigeru Murata, un garçon âgé d’une dizaine d’années, grâce à l’enseignement reçu d’une vieille femme superstitieuse, NonNonBâ. Elle est la dépositaire d’un grand savoir sur les yôkai alors que ceux-ci ont été relégués par la grande majorité des gens au rang de simples croyances ringardes.

Par le biais de petites histoires plus ou moins indépendantes, faisant généralement entre 16 et 20 planches, Shigeru Mizuki dresse le catalogue d’une quinzaine de yôkai, du simple fantôme au monstre sous-marin, nous permettant de découvrir un aspect de l’ancienne culture du Japon. Cependant, l’auteur ne s’arrête pas là et propose d’autres niveaux de lecture, donnant ainsi une grande force à son œuvre. Il nous permet aussi, de façon sobre mais émouvante, de vivre quelques instants de la vie de deux personnages très touchants, le jeune Shigeru Murata et la vieille NonNonBâ, auxquels il est impossible de ne pas s’attacher.

C’est avec la critique de la société japonaise de l’époque que le manga prend toute son ampleur. Par le biais des jeux guerriers des enfants représentant la propagande militariste et nationaliste gouvernementale, de l’impossibilité du père de Shigeru de vivre comme il l’entend, coincé par un système patriarcal ainsi que par ses obligations familiales et professionnelles, de l’extrême pauvreté qui peut régner dans de nombreux foyers, des agissements moralement douteux comme celui qui consiste à acheter des jeunes filles à des familles pauvres afin d’alimenter les réseaux de prostitution des grandes villes, Shigeru Mizuki nous permet de mieux connaître la société japonaise.

C’est ainsi que NonNonBâ est un ouvrage fort, servi par une très belle édition. On frise la perfection si ce n’est que la traduction ne plaira peut-être pas à tout le monde. En effet, le choix de garder dans certains cas les suffixes "–san" ou "–chan" est discutable. On peut considérer qu’il y avait d’autres moyens plus fluides de montrer le niveau de subtilité des relations entre les personnages. De même, de nombreux renvois aux notes, certes indispensables, hachent la lecture. Et le choix, là aussi assez contestable, de mettre la traduction des onomatopées sous les cases et non pas dans le corps du dessin, accroît l’aspect saccadé de la lecture. C’est un peu dommage, il y avait peut-être moyen d’éviter ces petits problèmes.

Il reste que ce manga est un des titres les plus intéressants qui nous ont été proposés de lire en 2006. Sa facilité de lecture, combinée à une grande richesse, permet à un large public d’y trouver son compte. Il s’agit donc d’une lecture indispensable pour tous ceux qui veulent élargir leur connaissance de la bande dessinée ou du Japon. Remercions les éditions Cornélius de nous avoir permis de découvrir Shigeru Mizuki, découverte que l’on pourra prolonger avec 3, rue des Mystères, puis avec le chef d’œuvre incontesté de l’auteur, Kitaro le repoussant, qui sortira courant 2007. Espérons qu’on aura plus tard la joie de tenir entre nos mains les versions françaises de Soîn Gyokusai Seyo et de Showa-shi.
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